Étude d’évaluation de l’efficacité passée,  actuelle et Future des dispositifs fiscaux incitatifs soutenant l’investissement immobilier  neuf locatif en France

Étude d’évaluation de l’efficacité passée, actuelle et Future des dispositifs fiscaux incitatifs soutenant l’investissement immobilier neuf locatif en France

PrimeView a réalisé sur demande une étude d’évaluation de l’efficacité des dispositifs fiscaux incitatifs soutenant l’investissement immobilier neuf locatif en France. Cette étude est disponible en téléchargement. Nous vous proposons ici sa synthèse.

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Synthèse

L’étude vise à évaluer l’efficacité passée, actuelle et future des dispositifs fiscaux incitatifs soutenant l’investissement immobilier neuf locatif en France.

Vous trouverez ci-après les principales conclusions des travaux réalisés par le cabinet d’études et de recherche indépendant PrimeView, qui a pour l’occasion :

  • Réalisé un benchmark exhaustif des rapports existants et listé toutes les bases de données disponibles sur le sujet
  • Noué des partenariats pour accéder ou récolter les données manquantes et consolider notre capacité d’analyse
  • Construit un simulateur permettant d’évaluer les flux financiers générés par les dispositifs fiscaux

Bilan financier des dispositifs

En s’appuyant sur un simulateur construit pour l’occasion, nous avons mesuré les couts et les recettes pour l’Etat générés par la construction de logements financés par des bailleurs personnes physiques, qu’ils le soient en droit commun ou via un dispositif fiscal incitatif.

Les conclusions sont claires : les logements ayant bénéficié des dispositifs fiscaux en soutien de l’immobilier locatif neuf ont contribué positivement à l’équilibre des finances publiques depuis 2000.

En effet, la construction des 724 000 logements neufs via les dispositifs d’incitation fiscale entre 1999 et 2018 devrait rapporter 18,2 milliards d’euros[1] à l’État, soit un gain d’environ 25 100 euros par logement neuf construit.

Dans le détail et en retenant l’hypothèse la moins favorable aux finances publiques, notre simulateur fait ressortir que :

  • la somme des manques à gagner atteindra 23,2 milliards d’euros, soit 32 000 euros par logement,
  • contre 41,4 milliards d’euros engrangés par l’État sur la même période, soit 57 100 euros par logement.

Lorsque nous nous intéressons plus précisément aux 188 000 logements construits via le dispositif Pinel au cours des 4 dernières années, notre simulateur fait ressortir les chiffres suivants :

  • 4,4 milliards d’euros de recettes nettes engrangées par l’État, soit environ 23 500 euros par logement construit et loué,
  • 11,2 milliards de recettes brutes pour l’État, soit 59 600 euros par logement,
  • 6,8 milliards d’euros de manque à gagner pour l’État, soit 36 200 euros par logement

Au final, un euro « investi » par l’État dans un logement bénéficiant du dispositif Pinel rapporterait 1,65 euros de revenus.

En faisant l’hypothèse conservatrice d’un nombre de logements construits bénéficiant du dispositif sur la période 2019-2025 correspondant à la moyenne des logements construits sur la période 1999-2018, l’État pourrait projeter un montant de recettes nettes proches d’1,2 milliards d’euros par an.

Impact sur les prix de l’immobilier

Les critères d’éligibilité au dispositif Pinel visant à ne pas exercer une pression à la hausse sur les prix de l’immobilier dans les zones concernées (plafonnement du prix unitaire du logement & plafonnement du prix de revient par mètre carré de surface habitable) semblent fonctionner.

En effet, nous avons pu vérifier que les prix de vente des logements neufs construits depuis le dispositif Besson (1998) évoluaient de pair avec les prix de l’immobilier neuf en général. La contribution des dispositifs fiscaux à l’augmentation de l’inflation des prix de l’immobilier n’est donc pas démontrée.

De même, nous n’avons pas constaté d’augmentation des loyers des logements neufs créés via les dispositifs qui serait supérieure à celle des loyers en général en France depuis 20 ans.

Au contraire, les loyers ne pouvant pas être durablement déconnectés de la dynamique salariale sous peine de ne pas trouver de locataire, que ce soit pour les logements financés par les dispositifs fiscaux (dont les loyers sont directement plafonnés) ou non, l’investissement locatif pousse les prix de l’immobilier neuf à évoluer de pair avec la dynamique de l’économie réelle. Au contraire des acquisitions pouvant être réalisées en résidence principale, pour lesquelles les négociations sont plus affectives et moins rationnelles, donc potentiellement plus spéculatives.

Des investisseurs bien ciblés

Très souvent salarié, l’investisseur en immobilier locatif neuf bénéficiant d’un avantage fiscal est en moyenne âgé de 47 ans. La plupart du temps propriétaire de sa résidence principale, nous avons pu vérifier que les ménages français considèrent les logements neufs qu’ils louent comme un produit d’investissement, au même titre que les actifs financiers (assurance-vie, obligations, actions, etc.) permettant de se constituer ou de gérer leur épargne.

Du point de vue du profil financier des investisseurs, nous avons dénombré 31 % des sondés déclarant avoir investi alors qu’ils ne disposaient que d’un seul revenu dans le foyer, contre 69 % qui déclaraient disposer de deux revenus. En termes de revenus,
58 % des sondés affichent des revenus inférieurs à 72k€ par an, et près de 81 % des revenus inférieurs à 96k€ par an. Au contraire, ils ne sont que 11 % à déclarer disposer de revenus supérieurs à 120k€ par an.

Les sondés déclarant en moyenne 2 parts par foyer (seulement 23 % d’entre eux déclarent une seule part, contre 9 % déclarant 3 parts ou plus), nous avons dénombré 93 % des sondés affichant des Taux Marginaux d’Imposition (TMI) inférieurs ou égaux à 30 %. Dans le détail, les ménages affichant un TMI de 14 % pèsent 13 % du total de l’échantillon, les ménages entre 14 % et 30 % pèsent 42 % du total, les ménages affichant un TMI à 30 % pèsent 38 % du total et les ménages avec un TMI supérieur ou égal à
41 % pèsent 6,5 % du total.

Au final, l’analyse du profil des investisseurs dans l’immobilier locatif neuf permet de faire ressortir un profil sociologique relativement clair et homogène :

  • Salarié,
  • âgé d’environ 47 ans,
  • vivant en couple,
  • disposant de deux revenus dans le ménage, majoritairement inférieur à 72 k€ par an,
  • imposé la plupart du temps à un taux marginal inférieur ou égal à 30 %.

Critères sociaux et géographiques adaptés

Les critères d’éligibilité aux dispositifs se sont progressivement affinés au cours des 20 dernières années, afin d’éliminer les externalités négatives constatées par le passé.

D’un point de vue géographique, les contraintes sont désormais fortes avec un resserrement depuis 2018 aux seules zones A bis, A et B1, permettant de cibler uniquement les zones dites tendues, à savoir là où l’offre de logements est jugée clairement insuffisante par rapport à la demande.

D’un point de vue social, les contraintes restent présentes sur les conditions de ressources des locataires ainsi que sur les loyers pratiqués, afin de répondre au besoin spécifique de logements intermédiaires dans les zones déficitaires en logements de ce type.

Au final, l’ensemble de ces critères auxquels il faut ajouter le respect de normes qualitatives strictes, amènent les investisseurs privés à financer le renouvellement du parc de logements sans faire appel à l’épargne publique, préférentiellement avec des logements T2 à T3 d’une surface comprise entre 40 et 60 mètres carrés et d’une qualité supérieure à celle de la moyenne du parc de logements historique. La clé de l’efficacité de ces critères sera d’une part la précision des zones géographiques sélectionnées et le contrôle du respect des critères sociaux d’autre part.

Les risques associés à l’extinction des dispositifs :
une attractivité naturelle limitée

Considéré par les investisseurs comme un produit concurrentiel aux actifs financiers traditionnels, nous avons évalué l’attractivité relative de l’investissement locatif neuf hors avantage fiscal.

Parmi les principales qualités associées à ce type d’investissement, nous relevons le statut de valeur refuge de celui-ci, mais aussi le fait qu’il réponde à un besoin avéré de logements dans les zones tendues (ciblées grâce au critère d’éligibilité géographique), susceptible de garantir à l’investisseur un flux de revenus constant dans le temps, et pouvant être acquis avec un effet de levier.

En revanche, un certain nombre de défauts sont associés aux actifs immobiliers, les principaux étant qu’ils sont peu liquides, non divisibles, beaucoup plus fiscalisés que les autres actifs financiers (hors incitation fiscale liée au dispositif) en particulier depuis l’instauration de la Flat Tax, et consommateurs de temps ou d’argent pour assurer la gestion du bien acquis.

Les caractéristiques naturelles d’un logement acheté pour louer rend nécessaire le fait que le rendement de ce type d’investissement doive offrir une prime (appelée prime de risque) à l’investisseur par rapport à d’autres classes d’actifs financiers pour que l’investisseur accepte d’immobiliser son épargne. Si la prime proposée par ce type d’investissement est estimée insuffisante, l’épargnant préfèrera placer son argent dans d’autres classes d’actifs, comme les actions, les obligations d’entreprises, le Private Equity, etc.

Or, en comparant la prime de risque immobilière à celles d’autres classes d’actifs, notamment les actions (qui versent des dividendes), nous nous apercevons que l’attractivité relative de l’investissement immobilier (hors incitation fiscale) s’est effondrée depuis le début des années 2000. Si, à l’époque, l’écart de primes de risque oscillait entre 3 % et 4 % en faveur de l’immobilier locatif, celui-ci oscille désormais autour de 0 % depuis la mise en place du dispositif Scellier. Sans avantage fiscal, l’immobilier locatif neuf parait donc aujourd’hui moins attractif que les autres classes d’actifs, au regard de ses caractéristiques intrinsèques.

En croisant les données de sondage réalisés par le cabinet PrimeView et par le Crédit Foncier, les résultats de l’analyse de l’impact sur les logements construits de la disparition de la zone B2 en 2018 et de la baisse relative de l’attractivité des dispositifs entre 2011 et 2013, nous estimons qu’en l’absence d’incitation fiscale, le nombre d’investisseurs potentiels serait significativement inférieur au nombre actuel de l’ordre de 80%, en raison du manque d’attractivité « brute » de ce produit d’investissement (faible liquidité, fiscalité lourde en terme relatif, etc.).

Les risques associés à une disparition d’un dispositif incitatif en soutien de l’investissement neuf locatif nous apparaissent en conséquence très élevés pour la sphère publique, que ce soit en termes de logements créés, d’emplois ou encore de finance publique.

Conclusion

Au terme de nos travaux, nous estimons que le dispositif fiscal Pinel est aujourd’hui un outil plus mature que les dispositifs qui l’ont précédé, simple de compréhension (au contraire des dispositifs s’appuyant sur le principe de l’amortissement) et suffisamment attractif pour l’investisseur. En outre, il présente des externalités clairement positives, puisqu’il :

  1. Contribue positivement à l’équilibre des finances publiques,
  2. N’engendre pas un surplus d’inflation sur le marché immobilier,
  3. Répond à des critères géographiques et sociaux désormais précis,
  4. Permet d’améliorer la qualité et la taille du parc de logements tout en évitant des dépenses publiques,
  5. Permet de lutter efficacement contre la volatilité macroéconomique.

Il faut toutefois noter que l’efficacité du dispositif réside dans la précision des critères sociaux mais surtout dans la notion de zonage, permettant de cibler les lieux où l’offre de logements est insuffisante par rapport à la demande


[1] Nous parlons ici d’engagements, i.e. le total des recettes nettes que rapportera un logement pendant toute la durée d’engagement à un dispositif. Ainsi, pour un logement construit en 2015 et bénéficiant du dispositif Pinel, nous mesurons les recettes totales qu’il générera entre 2015 et 2027, date à laquelle le propriétaire ne pourra plus bénéficier du dispositif.